Dans le monde de l'action, un paradoxe consiste à faire simultanément une chose et son contraire. Pour ne citer qu'un exemple, on peut relater le fait de prêter et d'emprunter en même temps tout en demandant qu'on vous fasse un don gracieux de votre dette (accès au statut PPTE). Et, en la matière, le Congo, non, Denis Sassou Nguesso est devenu un expert qui pourrait facilement dérouter et déconcerter les experts du comportement.
Nous avons publié un article dans lequel le porte-parole du gouvernement ivoirien reconnaissait que le Congo avait prêté 100 milliards de francs cfa en douce à la Côte-d'Ivoire. Dans son argumentation, le ministre affirmait que si un pays avait de l'argent à ne savoir quoi en faire (sic), rien n'empêchait qu'il le prête à un autre qui en avait le plus besoin. Cela suppose que le Congo a de l'argent en trop, des surliquidités qui ne peuvent servir à améliorer le quotidien des Congolais tellement les choses vont bien partout si l'on tire les conclusions de ce raisonnement à l'ivoirienne jusqu'à la dernière goutte de sauce graine. Ce qui évidemment est faux puisque tout va mal et ce ne sont pas les sinistrés du 4 mars 2012 qui vont dire le contraire.
D'un côté, ne parvenant plus à rembourser ses dettes, le Congo a dû se résoudre, tout pays producteur de pétrole qu'il est, à accéder au statut de pays pauvre très endetté (PPTE) lui permettant ainsi une remise de sa dette extérieure de plusieurs milliards de dollars. Parmi ceux qui ont permis à Sassou de bénéficier de telles largesses, on peut compter le Brésil (200 millions de dollars annulés), Dilma ayant dû succomber au charme hypnotique du cobra royal à corps d'éléphant ou l'Espagne.
Donc, selon toute vraisemblance, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes tordus et pourris pour Sassou puisque le Congo possède même près de la moitié des surliquidités à la BEAC - avec plus de 3000 milliards de francs cfa. Dans ce contexte, le grand nzokou peut faire montre de générosité avec autrui - même s'il est cynique avec le peuple congolais : quelques milliards à Youssoufou au Niger, un dépannage rapide de 50 milliards de francs cfa à la RCA qu'il a plongée dans le chaos par une mauvaise médiation à Libreville, 100 milliards à son "frère" Ouattara, des pourboires à des gentils paysans espagnols qui ont eu le mérite de lui sourire, une école reconstruite à un milliard de francs cfa en Chine pour faire plaisir aux "amis" chinois qui nous construisent des édifices architecturaux qui ont du mal à dépasser les cinq ans, et je dépense à tout casser car je n'ai aucun problème ! Même l'UMP dans la détresse financière est passée à Brazzaville tendre la main. De son retour du Congo, Coppé pouvait affirmer haut et fort que son parti pouvait rembourser les onze millions d'euros de dettes auprès des banques.
Seulement, voilà, le FMI nous apprend que le Congo a repris le chemin de l'emprunt provoquant un rapide gonflement de sa dette extérieure au point d'attirer l'attention de l'argentier international qui lui recommande désormais la prudence. Sassou, prudent ? Oui, il l'est mais seulement quand il s'agit de protéger son pouvoir. N'est-il pas l'homme qui a instauré la mode de la chemise jetable à plus de mille euros ? Dans sa cupidité, il trouvera toujours que le Congo n'a pas assez d'argent pour satisfaire son ego démesuré. Bien sûr, chère Christine Lagarde, il vous dira qu'il fera attention mais n'en fera qu'à sa tête.
Franchement, que fait Sassou de l'argent du Congo puisqu'il peut se permettre de devenir une banque pour d'autres nations africaines ? A quoi sert l'argent que Sassou emprunte puisque le peuple n'en voit pas les retombées ? Comment peut-on prêter les fonds de l'Etat à d'autres pays nécessiteux quand on a soi-même besoin d'argent et que l'on emprunte à des taux exorbitants, le Congo étant reconnu comme un mauvais payeur poursuivi par de nombreux créanciers ?
Tout ceci peut vous paraître incohérent mais il y a bien une logique derrière tout ce gaspillage qui vise la conservation du pouvoir au sein d'un clan et d'un camp : Sassou sait qu'un peuple malheureux qui n'a rien à manger et à boire ne peut s'atteler à combattre une dictature et, un régime qui le supplanterait ne pourra pas faire long feu sans argent. Aussi, il gaspille l'argent existant pour ensuite plonger le Congo dans des dettes afin que ce pays ne se développe jamais - de sorte que le clan Sassou & Nguesso soit toujours la famille la plus puissante du Congo qui se maintiendra ainsi au pouvoir - même si Denis Sassou Nguesso n'était plus de ce monde ad aeternam. Sachez que selon un proche de Sassou, ce dernier compte rester au pouvoir au moins jusqu'en 2025 - c'est-à-dire jusqu'à l'âge de 82 ans. ET VOUS AVEZ TOUS COMPRIS CE QUE CELA IMPLIQUE...