COMMENTAIRE : Ce texte peut se résumer comme la nécessité pour les Africains de bâtir une stratégie globale visant la défense de leurs propres intérêts - en commençant à penser le monde en dehors de toute influence extérieure car l'éducation et les connaissances qui viennent de nos ennemis ne sont que manipulation et domestication. Ouvrir un Centre d'Intelligence Africaine, c'est ce que je cherche à aller faire chez nous, au Congo. Hélas, le contexte national actuel ne s'y prête pas encore. Espérons que tout cela pourra changer un jour.
Ceux qui me lisent sur Facebook ou sur mon blog peuvent remarquer que je place la stratégie globale comme un élément fondamental de ma réflexion. Ce que dit le professeur en études stratégiques, O. S., je l'ai déjà dit en d'autres circonstances et de façon plus imagée. Dominés et aveuglés par l'éducation et la culture d'autrui, nous consommons tout : pensées, religions, produits manufacturés des autres, systèmes éducatifs des autres, etc. Nous n'avons pas encore pris le temps de comprendre la marche du monde pour déterminer la place qui nous est assignée dans ce système castifié où nous sommes en fait à la dernière place.
Ceux qui ont construit ce système des choses sont des violents, des menteurs, des êtres sans scrupules qui savent que nous émanciper signerait la fin de la civilisation occidentale. Ce sont les descendants des Huns, des Wizigoths, des Goths, des conquérants romains, des Anglo-saxons qui ont écumé l'histoire en l'écrivant en lettre de sang et de larmes. Ce sont ces gènes de conquérants et de guerriers cupides qui se frictionnent désormais dans une compétition financière ou économique - quand ils ne font pas carrément la guerre en Irak, en Lybie, en Syrie, etc, pour leurs intérêts qui consistent à s'emparer des matières premières du monde et de toute la substance du monde - en commençant par la matière grise. Ils nous maintiennent dans un certain carcan mental, physique, sociétal, spirituel et éducatif. Jamais nous n'avons pris le temps pour véritablement réfléchir sur le sens de l'histoire.
Dès que nous avons voitures, maisons et comptes en banque fournis, nous ne nous préoccupons plus de l'avenir de masse, de l'avenir de peuple, de l'avenir de race. Or, l'individu passe ; les peuples et les races demeurent. La place qu'on assigne à notre continent est celle d'entrepôt de matières premières et nous ne faisons rien pour que ça change. Le monde civilisé n'a pas l'intention d'industrialiser l'Afrique et ceux qui voudront émanciper l'Afrique des rets de l'Occident seront détruits, liquidés, assassinés comme Mouammar Khadafi.
Les puissances du monde, elles, sont dans cette logique de penser le monde comme un tout en le tournant vers la satisfaction de leurs propres intérêts, de leurs propres besoins - quitte à le dominer by force. Le jour où l'Europe pourra se passer de l'Afrique parce qu'elle aura développé des énergies propres, elle le fera et nous laissera livrés à nous-mêmes. Et il arrivera bien un moment où nous n'aurons plus ni pétrole, ni or, ni diamant, ni coltan, ni bois parce que les mindélés auront tout pris - pendant que nous passons notre temps à nous entre-tuer. Il ne nous restera plus que nos yeux pour pleurer car aucun Dieu ne viendra nous sauver de la volonté de puissance qui nous asservit depuis plus de sept siècles. Nous devons commencer par cesser d'organiser nos sociétés par mimétisme à l'occident. Ca ne nous réussit pas. Nous devons commencer par reconquérir notre identité atavique. Et c'est la chose la plus difficile qui soit...
LION DE MAKANDA, MWAN' MINDZUMB', MBUTA MUNTU
A LIRE ATTENTIVEMENT ET A MÉDITER : AVIS D'UN JOURNALISTE SUR L'AVENIR DE L’AFRIQUE
Il arrive dans la vie qu'une conversation banale nous secoue pendant des heures voire des jours. J'attendais tranquillement un ami au terminus d'autobus de Montréal quand un monsieur d'un certain âge a pris place à mes côtés avant d'engager l'une des conversations les plus enrichissantes de ma vie. Professeur d'études stratégiques dans un institut international, l'homme connaît le continent africain comme le fond de sa poche. Son analyse, son point de vue sur notre avenir, donne froid dans le dos. Et s'il vous plaît, ne sortez pas la rancune du « colon nostalgique ». Lisez avec la tête et la raison ce qu'il dit. Je vous rapporte fidèlement ses constats :
« Cela fait maintenant plus de 25 ans que j'enseigne la stratégie. Dans ma carrière, j'ai eu affaire à des dizaines d'officiers et de hauts fonctionnaires africains. Je suis malheureusement obligé de vous dire ceci : du point de vue des études stratégiques, de l'analyse et de l'anticipation, je leur donne un gros zéro pointé. Nos stagiaires africains sont très instruits, ils ont de belles tenues militaires ou manient le français de manière remarquable, mais, dans les cours, ils ne nous apportent rien. Tout simplement, parce qu'à ma connaissance, dans toute l'Afrique francophone, il n'y a pas un seul centre d'études stratégiques et internationales avec des vrais professionnels à leur tête. Je vais vous expliquer pourquoi je n'ai aucun espoir pour ce continent. Au moment où je parle, le monde fait face à trois enjeux principaux : l'énergie, la défense stratégique et la mondialisation. Donnez-moi un seul cas où l'Afrique apporte quelque chose. Rien !
Commençons par l'énergie et précisément le pétrole. Tous les experts mondialement reconnus sont unanimes à reconnaître que d'ici 15 à 20 ans, cette ressource sera rare et excessivement chère. En 2020, le prix du baril tournera autour de 120 dollars. C'est conscients de cette réalité que des pays comme les USA, la France, la Chine, le Royaume Uni, etc. ont mis sur pied des task force chargés d'étudier et de proposer des solutions qui permettront à ces nations de faire main basse sur les ressources mondiales, de s'assurer que quoi qu'il advienne, leur approvisionnement sera assuré. Or, que constate-t-on en Afrique ? Les dirigeants de ce continent ne sont même pas conscients du danger qui les guette : se retrouver tout simplement privé de pétrole, ce qui signifie ni plus ni moins qu'un retour à la préhistoire ! Dans un pays comme le Gabon qui verra ses puits de pétrole tarir dans un maximum de 10 ans, aucune mesure de sauvegarde, aucune mesure alternative n'est prise par les autorités. Au contraire, ils prient pour que l'on retrouve d'autres gisements. Pour l'Afrique, le pétrole ne comporte aucun enjeu stratégique : il suffit juste de pomper et de vendre. Les sommes récoltées prennent deux directions : les poches des dirigeants et les coffres des marchands d'arme. C'est pathétique.
Ensuite, la défense stratégique. L'état de déliquescence des armées africaines est si avancé que n'importe quel mouvement armé disposant de quelques pick-ups et de kalachnikovs est capable de les mettre en déroute. Je pense qu'il s'agit plus d'armées de répression intérieure que de guerre ou de défense intelligente. Pourquoi ? Parce que, comparées aux armées des nations développées, de la Chine, de l'Inde ou du Pakistan, les forces africaines rappellent plus le Moyen âge que le 21e siècle. Prenez par exemple le cas de la défense anti-aérienne. Il n'y a quasiment aucun pays qui possède un système de défense équipé de missiles anti-aériens modernes. Ils ont encore recours aux canons antiaériens. Les cartes dont disposent certains états-majors datent de la colonisation ! Et aucun pays n'a accès à des satellites capables de le renseigner sur les mouvements de personnes ou d'aéronefs suspects dans son espace aérien sans l'aide de forces étrangères. Quelle est la conséquence de cette inertie ? Aujourd'hui, des pays comme les Etats-Unis, la France ou le Royaume-Uni peuvent détruire, en une journée, toutes les structures d'une armée africaine sans envoyer un seul soldat au sol... Rien qu'en se servant des satellites, des missiles de croisière et des bombardiers stratégiques.
A mon avis et je crois que je rêve, si les pays africains se mettaient ensemble, et que chacun accepte de donner seulement 10 % de son budget militaire à un centre continental de recherche et d'application sur les systèmes de défense, le continent peut faire un pas de géant. Il y a en Russie, en Ukraine, en Chine, en Inde, des centaines de scientifiques de très haut niveau qui accepteraient de travailler pour 3000 dollars US par mois afin de vous livrer des armes sophistiquées fabriquées sur le continent et servant à votre défense. Ne croyez pas que je rigole. Il ne faut jamais être naïf. Si la survie de l'Occident passe par une recolonisation de l'Afrique et la mainmise sur ses ressources naturelles vitales, cela se fera sans état d'âme. Ne croyez pas trop au droit international et aux principes de paix, ce sont toujours les faibles qui s'accrochent à ces chimères. Je pense qu'il est temps de transformer vos officiers (dont 90 % sont des fils à papa pistonnés qui ne feront jamais la guerre et je sais de quoi je parle) en scientifiques capables de faire de la recherche et du développement. Mais, je suis sceptique. Je crois que ce continent restera enfoncé dans le sommeil jusqu'au jour où le ciel lui tombera sur la tête.
Enfin, la mondialisation. Malheureusement, comme dans tous les autres sujets qui ont fait leur temps, les stagiaires africains que nous recevons sont d'excellents perroquets qui répètent mécaniquement les arguments qu'ils entendent en Occident. A savoir, il faut la rendre humaine, aider les pays pauvres à y faire face. Vous savez, dans mes fonctions, il y a des réalités que je ne peux dire, mais je vais vous les dire. La mondialisation est juste la forme moderne de perpétuation de l'inégalité économique. Pour être clair, je vous dirai que ce concept a un but : garder les pays pauvres comme sources d'approvisionnement en biens et ressources qui permettraient aux pays riches de conserver leur niveau de vie. Autrement dit, le travail dur, pénible, à faible valeur ajoutée et impraticable en Occident sera fait dans le Tiers-monde. Ainsi, les appareils électroniques qui coûtaient 300 dollars US en 1980 reviennent toujours au même prix en 2006. Et puisque l'Afrique n'a toujours pas un plan cohérent de développement économique et d'indépendance, elle continuera à être un réservoir de consommation où seront déversés tous les produits fabriqués dans le monde.
Pour moi, l'indépendance signifie d'abord un certain degré d'autonomie.
Mais, quand je vois que des pays comme le Sénégal, le Mali, le Niger, le Tchad ou la Centrafrique importent quasiment 45 % de leur propre nourriture de l'étranger, vous comprendrez qu'un simple embargo militaire sur les livraisons de biens et services suffirait à les anéantir. Pour terminer, je vais vous raconter une anecdote. Je parlais avec un colonel sénégalais venu en stage chez nous il y a quelques mois. Nous regardions à la télévision les images de millions de Libanais qui défilaient dans les rues pour réclamer le retrait des soldats syriens de leur pays. Je lui ai demandé ce qu'il en pensait. Il m'a répondu : « Les Libanais veulent retrouver leur indépendance et la présence syrienne les étouffe ». C'est la réponse typique de la naïveté emprunte d'angélisme. Je lui ai expliqué que ces manifestations ne sont ni spontanées ni l'expression d'un ras-le-bol. Elles sont savamment planifiées parce qu'elles ont un but. Israël piaffe d'impatience d'en découdre avec le Hezbollah et puisque Tel-Aviv ne peut faire la guerre en même temps aux Palestiniens, au Hezbollah et à la Syrie, son souhait est que Damas se retire. Une fois le Liban à découvert, Israël aura carte blanche pour l'envahir et y faire ce qu'elle veut. J'ai appelé cet officier sénégalais il y a deux jours pour lui rappeler notre conservation. Malheureusement, il était passé à autre chose. Son stage ne lui a servi à rien.
J'espère vraiment qu'un jour, les Africains auront conscience de la force de l'union, de l'analyse et de l'anticipation. L'Histoire nous démontre que la coexistence entre peuples a toujours été et sera toujours un rapport de force. Le jour où vous aurez votre arme nucléaire comme la Chine et l'Inde, vous pourrez vous consacrer tranquillement à votre développement. Mais tant que vous aurez le genre de dirigeants que je rencontre souvent, vous ne comprendrez jamais que le respect s'arrache par l'intelligence et la force.
Je ne suis pas optimiste. Car, si demain l'Union Africaine ou la CEDEAO décide de créer un Institut africain d'études stratégiques crédible et fiable, les personnes qui seront choisies se précipiteront en Occident pour apprendre notre manière de voir le monde et ses enjeux. Or, l'enjeu est autre, il s'agit de développer leur manière de voir le monde, une manière africaine tenant compte des intérêts de l'Afrique. Alors, les fonctionnaires qui seront là, à statut diplomatique, surpayés, inefficaces et incapables de réfléchir sans l'apport des experts occidentaux se contenteront de faire du copier-coller, ce sera un autre parmi les multiples gâchis du continent.
Avant que vos ministères des Affaires étrangères ne fassent des analyses sur la marche du monde, ils feraient mieux d'en faire d'abord pour votre propre « intérêt ».
O.S. (journaliste, Montréal) : Veuillez transmettre ce message aux amis et connaissances africains et à tous ceux qui se soucient du réveil de l'Afrique.
9 juin, 18:32