BURKINA FASO/SOULEVEMENT POPULAIRE : LES LECONS D'UNE CONFISCATION DU TRIOMPHE DE LA RUE PAR L'ARMEE
Pourquoi "Sciences Po" et l'ENA n'existent pas en Afrique comme en France puisque nous sommes dans le syndrome de Spartacus (un sujet que nous allons bientôt développer) et voulons à tout prix ressembler aux Français, nos ex-toujours-colonisateurs (notamment par le franc cfa) et tout faire comme eux - en ce qui concerne le choix du modèle politique ? Le syndrome de Spartacus, ce trauma inconscient, est le trouble mental qui pousse le dominé à agir comme le dominant, l'esclave à agir et réagir comme le maître - lorsqu'il est libre, libéré ou proclamé comme tel. Les psychanalystes et les psychiatres doivent de pencher sur la question. En Afrique, il faudra installer les sciences politiques jusque dans les chiottes pour que les Africains apprennent à faire de la politique, la vraie.
Nous avons suivi les événements du Burkina Faso lorsque Blaise Compaoré avait décidé de changer la constitution jusqu'à sa chute et nous avons écrit : " Un Blaise Compaoré peut en cacher un autre " tout en prévenant les Burkinabés de faire attention pour ne pas se faire voler leur victoire sur le dictateur Blaise Compaoré (les textes sont en ligne ; vous pouvez vérifier nos propos). Nous avions en ce moment-là en tête les exemples de la Tunisie et de l'Egypte. La Tunisie peine à instaurer une vraie démocratie après avoir chassé Ben Ali du pouvoir. En Egypte, après avoir fait partir Moubarak, les Egyptiens se retrouvent à nouveau avec un militaire au sommet de l'Etat. L'Etat ressemble à un chat qui retombe toujours sur ses pieds. Ceux qui se hissent d'une manière ou d'une autre au sommet de l'Etat ne veulent plus en descendre et tout se joue comme dans le mythe de l'Olympe, à l'échelle des dieux. Le peuple peut en déloger un membre mais un autre le remplacera sans problème pour maintenir le système Etat en l'état.
Dans un texte, nous avons aussi expliqué pourquoi l'armée prenait souvent le pouvoir en Afrique, ce en quoi il constituait un problème qu'il fallait absolument résoudre car l'armée se comporte comme un Etat dans l'Etat qui finit se confondre avec l'Etat. Sur le continent noir, l'armée ne sert pas le peuple mais des intérêts étrangers et elle-même. Elle est organisée, hiérarchisée, disciplinée autour de la hiérarchie militaire et, elle détient la puissance de feu qui lui permet d'imposer sa volonté. Nous verrons qu'au Burkina Faso, si rien n'est fait, - nous avons déjà souhaité que les Burkinabés sortent dans la rue chaque que nécessaire - le lieutenant colonel Zida se maintiendra au pouvoir par un tour de passe-passe. Attendez, si aujourd'hui, alors qu'il n'a aucune légitimité, il passe outre et la constitution et la volonté du peuple, comment pourra-t-on l'évincer demain quand il aura pris le contrôle complet de la machine étatique ? Blaise Compaoré n'était qu'un rouage du système. Le peuple doit comprendre qu'il ne combat pas un individu mais un système connecté avec les puissances du monde. Les mains qui tiennent les armes sont noires mais les armes sont bien blanches...
En affaiblissant l'opposition, les dictatures rendent impossible la réalisation de la volonté du peuple de porter un civil au sommet de l'Etat. Que dit la constitution burkinabée en matière de vacance du pouvoir ? Pourquoi la constitution est-elle brusquement mise hors-jeu ? Cela démontre la fragilité de nos textes constitutionnels qu'il faudra remanier. Combien de temps va durer la transition ? Un, deux, trois, quatre, cinq, six ans ? Au nom de quoi ? Qu'est-ce qui rend légitime ces transitions ? Le temps nécessaire pour que Zida contrôle tout l'appareil d'Etat ? On prétend que Zida était l'homme qui avait interdit que l'on tire sur la foule - alors pourquoi à présent qu'il s'est autoproclamé chef de l'Etat, l'armée se permet de tirer sur la foule ? Pourquoi ne pas continuer à revendiquer le respect de l'ordre constitutionnel ? Parce que l'ordre constitutionnel est faible en Afrique : personne n'y croit vraiment ; c'est juste par mimétisme de l'occident qu'on l'instaure mais la preuve est faite que nos républiques mimétiques semblent fragiles parce que non basées sur un socle culturel fondamentalement africain. On ne peut exclure aujourd'hui une nécessaire réflexion sur la nature même du pouvoir en Afrique et sur l'adéquation des institutions à l'esprit collectif.
Tout paraît programmé pour que le pouvoir revienne toujours à l'armée ou à ceux qu'elle soutient et c'est un problème que l'Afrique doit résoudre. Si le pouvoir est au bout du canon, le canon est pointé sur le peuple et non sur les ennemis dudit peuple.
Le problème ? L'Etat ! Comme un sommet au pied duquel s'arrête toute insurrection populaire. L'Etat africain comme le système colonial avant lui reste déconnecté du peuple. Il prétend protéger le peuple mais en fait, il le tient en laisse pour que les puissances du monde viennent se servir allègrement en Afrique. Il faut donc changer la nature même de l'Etat voire de l'armée pour prétendre démocratiser l'Afrique. Nous pensons qu'il faut une tradi-république puisque la république à l'occidental ne nous réussit pas. Il vous suffira de lire ce que nous avons écrit sur le sujet.
Il n'y a qu'un moyen de faire plier Zida : paralyser l'appareil de l'Etat et l'empêcher de fonctionner par des grèves généralisées, prolongées. Les Burkinabés doivent rester chez eux et ne pas aller travailler. Il faut ajouter la grève et la désobéissance civile à l'action de la rue. Autrement, Zida aura vite fait de devenir un autre Compaoré. L'armée ou un de ses représentants au pouvoir, c'est la force au pouvoir. Et la force au pouvoir, c'est déjà une dictature. IL N'Y A DE DEMOCRATIE QUE SI LA VOLONTE DU PEUPLE EST AU POUVOIR. Mes frères du Burkina Faso, nous avons bon espoir que vous lirez cet article...
LION DE MAKANDA MWAN' MINZUMB'