Au Congo, lors des dernières élections législatives, il est le seul qui a réussi à vaincre la pesanteur ethnotribale en se faisant élire par nomination présidentielle député à Vindza, très très loin de sa Cuvette natale, il est aussi celui dont les "sages" de la localité ont été invités à Oyo pour une "menace-party" et il est celui qui a ressenti, face à la controverse populaire, la nécessité d'écrire une lettre citoyenne pour se féliciter de son "élection-cooptation-nomination" à Vindza. Alors, puisque cette missive est citoyenne, puisqu'elle nous est destinée, prenons plaisir à l'analyser pour en mesurer la pertinence, pour en déchiffrer la signification profonde, pour en extirper les non-dits et peut-être pour en dégager les mérites. On dit souvent que la critique est facile mais que dire de l'analyse ? C'est un travail assurément délicat puisqu'il faut plonger dans les méandres de la pensée d'autrui et maître Aimé Emmanuel Yoka n'est pas des moindres puisqu'il est capable d'assurer sa propre défense. Sa lettre doit être conçue comme un message-bouclier qui contient en lui-même tous les éléments de sa propre défense.
A ceux qui me lisent tous les jours, je vous demande d'avoir à l'esprit le fait que le PCT a retiré certains de ses candidats non locaux à Pointe-Noire et qu'ailleurs, certains ont dû jeter les armes face à la grogne populaire comme le ministre Hellot Mampouya.
Alors, sans plus tarder, examinons le chef-d'oeuvre du ministre de l'injustice, Aimé Emmanuel Yoka ! Vous trouverez mes remarques en rouge...
«Mesdames, Messieurs; Chers concitoyens!
Dans le cadre du calendrier électoral de cette année 2012, j’ai posé ma candidature au Pool, dans la circonscription unique du district de Vindza. Et, comme vous l’avez, certainement, constaté, ma candidature a été, sans doute, la plus controversée de l’histoire des législatives dans notre pays, simplement, du fait que je ne suis pas originaire de ce département. Arrêtons-nous sur le fait que sa candidature soit la plus controversée et tenez-vous bien, de TOUTE L'HISTOIRE DES LEGISLATIVES DU CONGO - c'est dire qu'elle vaut le coup d'être examinée. Pourquoi l'est-elle, au fait ? Parce qu'il n'a fait que vivre deux jours et trois secondes à Vindza ou parce qu'il y a été parachuté ou parce qu'il n'a pas gagné sa place de député dans les urnes ? Certes, la loi lui permet de se présenter à Vindza mais aucune loi au monde ne lui garantit la victoire !
On aura tout entendu: railleries et sarcasmes, outrages et menaces. Mais, le camp de ceux qui ont cru à mon défi, qui refusent l’affaiblissement de l’Etat et l’effondrement de la Nation, a été le plus grand, le plus fort. Intéressant ! Ici, Aimé Emmanuel Yoka parle et désigne son camp : l'Etat qui est forcément le plus fort face à un peuple réduit au silence et à l'obéissance - même en l'espèce il eut fallu que l'Etat ne se mêlât pas d'un scrutin démocratique et personne ne peut imaginer que la non élection de Yoka à Vindza ait pu affaiblir l'Etat ou provoquer l'affaiblissment de la nation ! Ici, il y a une exagération dans laquelle Aimé Emmanuel Yoka profite pour remercier la puissance tutélaire de Sassou qui a tenu à l'imposer aux habitants de Vindza comme député.
En prenant la décision de me lancer dans cette bataille, de manière tout à fait normale et légale du reste, car la loi électorale ne s’y oppose aucunement- j’étais loin, très loin de m’imaginer que mon acte citoyen, pourtant si ordinaire, pouvait autant déranger, autant inquiéter certains compatriotes. L'acte de Yoka n'a dérangé que dans le fait que quoi qu'il advienne, le pouvoir avait décidé de faire du gardien du temple de l'injustice un député et il ne dit pas pourquoi il ne s'est pas présenté au nord mais à Vindza : c'est que ce n'est pas lui qui décide mais le parti et le parti subit lui-même les desideratas de Denis Sassou Nguesso. Oui, à la liberté de se présenter partout mais pas de s'imposer partout en bafouant les urnes, les voix des électeurs. Qui peut croire à la victoire de Yoka dans le cadre d'une véritable élection démocratique ?
Dans les allées du pouvoir, dans les états-majors des partis politiques, à défaut de désigner autrement ces enclos où on élève plus d’intrigants que de militants, où on forme plus d’acrobates que de responsables politiques, parmi les hauts cadres aussi, hélas, ma candidature a, en effet, beaucoup agacé les esprits encore mus par des ressorts partisans et sectaires, grégaires et égoïstes. C’est ainsi que j’ai été traité d’étranger dans mon propre pays. Dans ces conditions, comment seraient désignés alors toutes ces femmes et tous ces hommes, venus d’autres cieux, pour s’établir dans notre pays ? Des martiens, probablement ! Dans ce paragraphe, Aimé Emmanuel Yoka, pourtant éminent membre du pouvoir, accuse ce dernier d'élever des intrigants dans ses officines (il en est peut-être un), de l'avoir traité d'"étranger" - et on se demande qui l'a dit et pourquoi : aurait-il, lui aussi, des origines étrangères ? Nous savons qu'il a d'importants investissements au Bénin...
Fort heureusement, en toute souveraineté, les populations de Vindza ont choisi de m’accorder leurs suffrages. J’ai ainsi été élu député au deuxième tour, dans la circonscription unique du district de Vindza, le 5 août 2012. Une date, désormais, historique, je le pense bien. Une date, dorénavant, inscrite en lettres d’unité dans les annales des législatives au Congo. En effet, Vindza vient d’interpeller l’élite congolaise dans son ensemble, pour lui dispenser une belle leçon de démocratie, par l’exemple. Non, ici, nous devons inverser les paroles d'Aimé Emmanuel Yoka qui en fait culpabilise pour ne pas avoir été élu et parle à la place des habitants de Vindza qui ont vu leurs suffrages volés (cf. article sur Jean-Paul Matsima). Cette imposture fera date car à la prochaine législature, les nordistes pourront se présenter partout et le Congo aura une assemblée nationale 100% nordiste. N'avons-nous pas déjà une assemblée dans laquelle les autres partis ne peuvent pas former de groupe pour s'exprimer à l'assemblée nationale ? La prochaine étape est qu'il n'y ait aucun sudiste à l'assemblée nationale...
Longtemps maintenues, comme celles de tous les départements du Congo, dans une sorte d’ostracisme politique, les populations de Vindza se sont ravisées et ont décidé, cette fois-ci, de vaincre les peurs, de s’affranchir des tabous, de braver des interdits supposés spirituels, afin de construire leur destin autrement. Elles se sont défaites des considérations ethnicistes et ont jeté leur dévolu, non plus sur un fils du coin, un enfant du terroir ethnique, mais plutôt, sur un fils du territoire national qui s’engage à leur apporter, actes à l’appui, un véritable changement tangible dans leur cadre de vie. Pourquoi les habitants de Vindza auraient-ils fait cela quand ils savaient qu'à Oyo, c'est le fils de Sassou qui a été élu et que partout ailleurs, c'est le lien au terroir, au sang et à la culture locale qui avait prévalu ? Quel sudiste candidat au nord a-t-il été élu ? Personne ! L'exception de Vindza ne peut se comprendre et s'expliquer que comme une tricherie car les Vindzéens ne sont pas plus démocrates que les habitants d'Oyo qui ont élu un fils de Mbochi en délaissant un sudiste, candidat acheté par Christel Sassou Nguesso pour donner l'illusion d'une élection démocratique. .
Une preuve que l’exercice ethnique, où qu’il se pratique, n’a jamais été que le fait d’une instrumentalisation des populations par l’élite. Une élite qui, pendant très longtemps, n’a servi aux populations que des plats d’illusions, tandis qu’à Brazzaville où ailleurs, ce type d’élite étouffe sous le poids d’un excès de bien-être. Vraiment cet avocat a le sens de l'humour car il parle de l'élite comme s'il n'en faisait pas partie, comme s'il en était à son tour une victime. Il a certainement raison de penser que l'exercice ethnique est une instrumentalisation des populations par l'élite mais qu'a-t-il donc fait en sa qualité de ministre pour lutter contre ce phénomène ? Rien ! Ici, il ne produit ce discours que parce qu'il veut justifier son élection et c'est bien le seul député qui se coupe de l'Etat et de l'élite dont il appartient pour produire une justification. Si la justice fonctionnait correctement, l'ethnoracisme aurait moins d'impact dans notre pays. C'est bien que Yoka reconnaisse que l'élite étouffe sous le poids d'un excès de bien-être et nous savons que cet excès est mal acquis et que c'est à la justice de nous en délivrer, espèce de ministre de l'injustice !
Mesdames, Messieurs, chers concitoyens!
Croyez-moi, aucune unité nationale, et partant, aucun progrès dans le pays ne sera possible, tant que chacun de nous n’aura pour référent politique que son village natal, son terroir, et pour doctrine politique, le nombrilisme. C'est une grande vérité que nous soulevons tout le temps et dans notre bouche, elle ne sonne pas faux car ce sont les nordistes qui ont fait de leur village natal, de leur terroir un référent politique pour distribuer des privilèges et lui Aimé Emmanuel Yoka, ministre de l'injustice, n'est pas du reste. Lui semble découvrir cette réalité dont il est pourtant un des théoriciens et un des adeptes et jamais en sa qualité de ministre de l'injustice, il n'a eu assez de sagesse pour dénoncer cet état de fait. Il a fallu attendre une banale justification qui n'était pas nécessaire - puisqu'il était élu avant d'être candidat - pour l'entendre faire mine de dénoncer une réalité qu'il a fait, qu'il fait chaque jour que Dieu fait en rendant l'injustice en faveur des nordistes au travers de son ministère. Sassou aurait pu au moins faire semblant de mettre un non mbochi à la tête de ce ministère (de l'injustice) pour créer une illusion un peu plus ... illusoire !
Or, la mission du politique consiste, justement, à sortir du terroir ethnique, sans le renier, en y abandonnant tous les préjugés négatifs, pour se déployer sur le territoire national, afin d’y semer, partout, les valeurs de la République que sont l’Unité, le Travail et le Progrès pour tous. Pourquoi ne le dites-vous pas à Sassou qui dès qu'il s'agit d'un projet pense d'abord à son petit village de pêcheurs, Oyo ? Comment croire à l'unité nationale quand dès lors qu'il s'agit d'un barrage hydroélectrique, Denis Sassou nguesso pense d'abord au nord peu peuplé puisque la majorité de la population vit dans les grandes villes du sud ? Les sudistes sont-ils les seuls parce que dominés à être obligés de respecter les lois et valeurs de la république ? Pourquoi ne demande-t-on pas aux nordistes qui tuent ou qui volent le denier de l'Etat de respecter les lois et valeurs de la république et surtout, pourquoi ces lois et valeurs ne semblent pas s'appliquer à eux comme s'ils étaient au dessus d'elles ? Il faut mettre fin à l'ignoble domination du sud par le nord au nom de la conservation du pouvoir car développer le sud ne signifie pas obligatoirement créer des conditions pour un changement de pouvoir : en fait, le sud appartient à tous les Congolais puisque même les nordistes y vivent en grand nombre...
Il importe, ici, de préciser que le sentiment d’attachement à un terroir est de l’ordre du naturel, il est même génétique; en aucune manière, on ne saurait le condamner. Mais, ce contre quoi je m’insurge, c’est cette sorte d’appropriation du terroir par l’élite, cet apprivoisement de la communauté ethnique qui s’apparente à l’esclavagisme, ce fétichisme politique pratiqué par l’homme au pouvoir à des fins strictement personnelles. Fins strictement personnelles, n'est-ce pas ce qui vous a guidé à vous présenter à Vindza dont vous vous foutez du sort des populations ? Nous savons bien vous et moi, qu'il ne faut pas attendre qu'un vieux ministre se présente dans une localité pour que l'Etat s'en occupe. Si rien n'a été fait pour Vindza, il y a quinze ans, je ne vois pas comment les choses vont changer avec vous puisque ce n'est pas vous qui décidez. Vous auriez pu nous épargner ce baratin lourd et plein de contradictions !
Le territoire national est un bien sacré. Un bien commun de tous les Congolais. Ainsi, en tant que parcelle de cette entité nationale, aucun terroir ethnique ne peut être la propriété privée d’un individu quelconque ou d’un groupe d’individus, quels que soient leurs statuts. Ca, il faut le dire à Sassou qui pense qu'il faut une zone industrielle autour d'Oyo, le courant et l'eau à Oyo, les vaches à Oyo, les crocodiles à Oyo, etc.
Je remercie les populations du Pool, particulièrement mes électeurs du district de Vindza, ma terre d’adoption, d’avoir compris mon message. Oui, les sages de Vindza ont transmis les menaces de Sassou aux autres habitants ! Vous n'êtes d'ailleurs pas obligé d'y vivre - donc, pourquoi vous inquiéter ? J’ai tout juste voulu, en posant ma candidature à Vindza, apporter ma petite pierre à l’œuvre de consolidation, de raffermissement de l’unité nationale, bien mise à mal dans notre pays. Nous l’avons tous vécu au fil des événements politiques de ces dernières années. Nous continuons, d’ailleurs, à le vivre au quotidien, d’une certaine manière, du fait d’un environnement politique et social chargé de violences symboliques. Ah bon ? Vous croyez qu'il vous suffit d'être candidat à Vindza pour raffermir l'unité nationale ? Juste si peu ? Et que va-t-on penser le jour où un mokongo sera député d'Oyo ? Etrange qu'un ministre de l'injustice parle de violences symboliques - alors que les Congolais subissent des violences bien physiques, celles-là, sans qu'il ne bouge le petit doigt !
Je n’oublie pas et je remercie, également, les populations du département de la Cuvette, ma terre natale, qui ont respecté ma démarche, avec beaucoup de hauteur et de dignité, avec beaucoup d’espérance aussi, en me laissant aller à la rencontre de leurs frères et sœurs de Vindza. Bof, si vous avez permuté avec un membre du PCT de Vindza pour vous remplacer dans la Cuvette, là, ils vous auraient "remercié" ! C'est de l'ironie, une figure rhétorique, bien connue de l'avocat que vous êtes (d'ailleurs on se demande ce que vous défendez vraiment, maître Aimé Emmanuel Yoka, le système ?)...
En un mot, c’est surtout au peuple congolais, pour ne pas dire à lui tout seul, que revient cette victoire électorale de Vindza, dans le Pool, qui apparaît ainsi comme un champ d’expérimentation d’une démocratie réellement participative, le point de départ d’une autre conception de la République plus fraternelle, la source origine d’une nouvelle vision politique plus fédératrice des populations. Ho, ho ! Pas si vite ! Pourquoi mêlez-vous le peuple congolais à cette mascarade électorale dont vous êtes le seul bénéficiaire ? Une autre "république plus fraternelle" ? Vous croyez que votre simulacre d'élection est synonyme de fraternité ? En tout cas, vous n'êtes pas le frère de Jean-Paul Matsima qui n'a pas apprécié ce que vous avez fait et les Congolais non plus !
Le Président de la République a écrit, dans son ouvrage, «Le manguier, le fleuve et la souris»: «Une Nation est composée d’éléments disparates, souvent marqués par une longue histoire d’hostilités. La mission d’un Etat et de son chef est de proposer un projet commun suffisamment élevé pour dépasser ces contradictions et les intérêts particuliers, ethniques ou religieux». ALORS, S'IL A VRAIMENT ECRIT CELA, POURQUOI NE MONTRE-T-IL PAS LE BON EXEMPLE ? POURQUOI SUE-T-IL LA HAINE DU MOKONGO ? NE SERVIR QUE LE NORD, N'EST-CE PAS SERVIR DES INTERETS PARTICULIERS ? VOUS VOULEZ QUE JE MULTIPLIE LES EXEMPLES ?
Fort de cet enseignement, je lance un appel à tous mes concitoyens, afin qu’ensemble, nous puissions engager, de manière soutenue, une réflexion hardie sur la question nationale dans notre pays. Afin qu’ensemble, nous instituions une croisade permanente contre le tribalisme et l’intolérance, ces fléaux retardateurs des évolutions de notre société.
Œuvrons tous de concert à ce que notre pays, la République du Congo, ait profondément, un goût d’unité nationale véritable, un parfum de bien-être collectif, pour que vive la démocratie, dans sa dimension la plus noble, dans son expression la plus civilisée. Je vous remercie». Pour notre part, nous ne vous avons pas attendu, vous et vos élections truquées pour commencer à réfléchir : mes plus de 1600 articles parlent pour moi. Pour terminer, sachez que cette lettre citoyenne ne vous confèrera aucune légitimité car au fond des coeurs, TOUS SAVENT, ET VOUS LE SAVEZ AUSSI, QUE VOUS ETES UN DEPUTE ILLEGITIME QUI N'A AUCUNE AUTORITE POUR REPRESENTER LE PEUPLE CONGOLAIS... Rassurez-vous : les autres aussi !