Je suis un critique politique hautement panafricain. Ce qui m'amène à scruter patiemment ce qui se passe ici ou là sur mon continent. Nous assistons à la crise ivoirienne entretenue par la communauté internationale qui n'est autre que la voix des superpuissances industrielles.
Il y a un enjeu qui dépasse le cadre de la seule Côte d'Ivoire dans le conflit qui secoue actuellement ce riche pays : il s'agit de savoir si les chefs d'Etat africains doivent continuer à être nommés par la France comme l'étaient les anciens gouverneurs coloniaux ou si les Africains doivent résoudre les problèmes de souveraineté eux-mêmes. Si Gbagbo était un vulgaire pion de la France et de la françafrique, il y a longtemps que cette affaire aurait été rangée dans un placard de la cellule africaine de l'Elysée.
Personne ne s'interroge sur ce qui s'est vraiment passé au nord de la Côte d'Ivoire où les électeurs de Gbagbo ont été privés du droit de vote, certaines vidéos montrant que quelques-uns ont été bastonnés. Ce n'est pas pour prendre le parti de Laurent Gbagbo mais pour dire que la communauté internationale prend parti pour Ouattara sans chercher à savoir ce qu'il en est exactement. La CEI doit dire pourquoi elle a dépassé le délai et les chiffres doivent être revérifiés. Qu'on se souvienne de la contestation d'AL GORE aux Etats-Unis contre BUSH FILS. La proclamation du vainqueur a été retardée et c'est l'instance habilitée qui a bien proclamé les résultats : la cour suprême des Etats-Unis. Aucun Etat ne s'en est mêlé car il en allait de la souveraineté américaine. La souveraineté de la Côte d'Ivoire serait-elle une souveraineté au rabais ? Depuis quand a-t-on vu les Africains se mêler d'élections occidentales ? Dans le cas du Gabon, Sarkozy prétendait que la France n'avait aucun candidat mais elle n'a rien dit quand Ali Bongo a inversé les chiffres pour voler la présidence de la république à MBA OBAME.
C'est bien au Conseil Constitutionnel de la Côte d'Ivoire que revient le dernier mot dans cette élection. Il faut discuter avec elle avant de prendre parti pour tel ou tel candidat. Or, ce n'est pas le cas. Hélas, on voit la France contester la souveraineté d'un pays indépendant. Ici, il y a un vrai problème de souveraineté. Il revient à la Côte d'Ivoire seule de dire qui est ou n'est pas président sans préjuger des erreurs possibles. Il faudra bien que le règne des gouverneurs noirs prenne fin et Laurent Gbagbo risque d'en devenir le symbole. En ce qui me concerne, on devrait au moins suivre ce que dit la Constitution ivoirienne au lieu de prendre position en fonction de ses intérêts : l'élection devrait être ou annulée ou reprise partiellement au niveau des points de contestation. Ainsi, on respecterait les deux protagonistes et si Ouattara est sûr de l'emporter, il n'aurait aucun mal à accepter de nouveaux votes ou une nouvelle élection.
Une marche de soutien à Laurent Gbagbo a été organisée en France et on se rend compte que les Ivoiriens et autres Africains ont bien compris l'enjeu de cette élection. Si les choses continuent de la sorte, Gbagbo risque de devenir le héros des masses africaines désireuses de ne plus voir la France et les Occidentaux se mêler de ce qui ne les regarde pas. En se rassemblant devant le Conseil Constitutionnel français qui valide les élections françaises comme c'est le cas en Côte d'Ivoire, les Ivoiriens envoient un message clair à la France : "Chez nous ça doit se passer comme ça se passe chez vous !"
L'image qui a montré le président de la CEI flanqué des ambassadeurs de France et des Etats-Unis a fait des ravages dans l'imagerie africaine. Cet homme ne semblait libre de proclamer les résultats que s'ils correspondaient aux attentes de ces deux superpuissances. Un jour, les idées de l'UPIERAD finiront par devenir les idées dominantes de l'Afrique : on doit nous-mêmes gérer nos ressources car là est l'enjeu capital de savoir si un nationaliste ou un pro-occidental est au pouvoir...