Merci à mon ami P.O. pour la vidéo de la Grande Interview au cours de laquelle monsieur Smith reçoit l'économiste Tsengué Tsengué que je ne connaissais pas. Cet homme dirige la PMI congolaise Challenge Futura spécialisée dans l'ingénierie et la fabrication industrielle d'équipements agricoles ainsi que l'énergie et l'eau. Un homme de terrain qui est arrivé à la même conclusion que nous : le Congo ne sera pas un pays émergent en 2025. Pour la bonne raison que tout y fait défaut : les ressources humaines, l'énergie, les infrastructures, le cadre favorisant la création d'entreprise, etc.
Nous avons toujours dit et nos 371 abonnés peuvent en témoigner que ce que nous devons demander aux Chinois ce n'est pas de construire nos routes ou nos barrages mais de nous apprendre à les construire nous-mêmes au travers d'instituts technologiques renforcés par des projets infrastructurels ou de terrain qui permettraient aux ingénieurs congolais de se faire les dents, d'affûter leurs premières armes. D'ailleurs, les Chinois eux-mêmes imposent à l'Europe un transfert de technologie qui leur permet d'avancer au point où ils peuvent prétendre à la deuxième place en matière de puissance économique. Aujourd'hui, la Chine forme ses propres ingénieurs, produit ses propres avions, ses propres voitures, ses propres biens de consommation avant de les exporter. Et nous savons ce qu'était la Chine de Mao, un pays fermé, sous embargo qui a trouvé les ressources pour se transcender afin de devenir la puissance qu'elle est aujourd'hui. La Chine a par exemple le monopole de la production des terres rares si recherchées par les industries de pointe.
Nous en Afrique, à quelques exceptions près, avons des matières premières mais comme nous n'imposons pas que les multinationales extractives les transforment sur place, nous ratons l'occasion qui nous aurait permis de passer la phase intermédiaire qui conduit à l'émergence. Rien que le pétrole aurait créé des milliers d'emplois s'il était transformé sur place, et je ne parle pas du bois, du fer et de tous les autres minérais comme la potasse, le manganèse, l'or, etc.
L'émergence, c'est la capacité à produire la nourriture, le savoir, le savoir-faire, les outils et les biens qui sont à même de satisfaire votre propre demande intérieure. Il est possible de passer par une phase intermédiaire de dépendance ou de semi-dépendance où des compétences sont créées ou renforcées mais au final, c'est à nous de créer ce dont le Congo a besoin. Monsieur Tsengué Tsengué a raison de dire que l'on n'achète pas l'émergence et on n'est pas un pays émergent si on ne produit rien parce que tout ou presque est importé.
Il est de bon ton de croire que les conseillers de monsieur Sassou Nguesso sont des pointures universitaires mais nous ne croyons pas qu'ils soient aussi bons qu'on le prétend sinon ils ne laisseraient pas le chef de l'Etat prendre de très mauvaises décisions et surtout ne pas mettre à l'endroit le séquencement du développement national. Pour moi, un homme comme Tsengué Tsengué, médaillé d'or à Genève pour son inventivité devrait prendre la place de Louis Bakabadio comme conseiller à la présidence de la république car il fait ses preuves sur le terrain avec peu de moyens. C'est dommage que l'Etat congolais n'aide pas assez les PMI comme Challenge Futura et qu'il faille que les soutiens viennent d'ailleurs. Les PMI ont besoin d'allègements fiscaux, de financements nationaux pour orienter leur production en direction du marché intérieur. Pour ne prendre que l'exemple de la France, les PMI sont en matière d'emplois les champions du recrutement.
Nous savons que le président nous lit. Il sait que nous avons toujours été pour que l'on favorise les acteurs économiques locaux avant tout. L'Etat peut subventionner ses PMI innovantes car elles ont le potentiel de sortir le pays de l'ornière mais pour y arriver, il faut des infrastructures, des ressources humaines, des compétences, de la formation et des enseignants de qualité - d'où une véritable refonte du système éducatif congolais.
Nous pouvons parvenir au développement ou à l'émergence si le Congo s'en donne les moyens, c'est-à-dire, si la nation rassemble dans l'ordre tous les ingrédients qui peuvent nous conduire à réduire notre dépendance économique envers l'extérieur : c'est quoi ce pays à la terre si fertile qui importe même l'oignon et la tomate ? Produire d'abord, chercher à transformer ensuite et enfin exporter. Et comme le dit le président Obama, si nous le voulons, YES WE CAN. En tout cas, nous l'avons déjà dit que ça ne sera pas le cas en 2025. Nous gaspillons déjà la seule ressource qui peut nous permettre de développer les autres ressources : l'argent, la ressource universelle qui peut acheter ou développer le savoir, le savoir-faire, le savoir-combiner, le savoir-construire, le savoir-décider, le management, etc, en finançant par exemple des anniversaires comme celui de madame Antoinette Sassou Nguesso à coups de millions d'euros publics, un argent qui donné à Challenge Futura aura permis à cette PMI de passer un cap et de voir plus loin.
C'est vraiment triste de voir des fils de la terre du Congo foutre leur propre pays en l'air - parce qu'ils ne savent pas à quoi sert véritablement l'argent.
L'émergence n'est pas possible aujourd'hui et elle ne sera même pas possible en 2080 si rien n'est fait, si nous continuons à gaspiller nos ressources, à gaspiller l'argent public au lieu de faire les investissements intelligents qui changeraient l'avenir de notre pays.
A la base du kimuntu, il y a l'homme, le bien le plus prestigieux qui soit sur cette planète car il est celui qui peut produire la richesse. Nous, Bantous, plaçons l'homme au piedestal de l'importance, un état d'esprit qui se perd aujourd'hui parce que l'argent facile est privilégié, l'argent qui a supplanté l'homme en matière d'importance. Or, Denis Sassou Nguesso tue la jeunesse en tuant l'école et en n'utilisant pas les richesses du pays à bon escient. Ce n'est pas en 2080 quand nous n'aurons plus assez de pétrole, c'est-à-dire plus assez d'argent que l'émergence sera possible.
Aucun pays ne s'est développé sans produire et exploiter son propre savoir,son propre savoir-faire, ses propres structures, ses propres matières premières - même si parfois il faut collaborer avec les autres - et cela, nous n'y prenons pas le chemin. En tout cas, pas tant que Sassou restera au pouvoir et que Louis Bakabadio sera son sempiternel conseiller...