A la lecture de ce texte, ceux qui me traitent d'extrémiste, vont avoir de quoi mastiquer mais qu'ils se rassurent, je l'avoue, oui, je suis un extrême démocrate et l'extrémisme en démocratie ne s'est pas encore manifesté dans les sociétés modernes car ceux qui ont créé la société extrême démocrate, c'étaient nos ancêtres, les hommes investis du kimuntu. La démocratie à l'occidental n'est que la dictature d'une majorité politique sur une nation avec diktat de son projet politique sur l'étendue sociétale pendant un moment donné jusqu'à ce qu'une élection vienne changer la donne et, tout ceci, avec l'accord du peuple et la sanctification de la loi.
Ce modèle démocratique occidental construit à l'infini un cycle, suite à l'aliénation du peuple, qui appelle une entité représentative de tous qui devient entité de gouvernance, cycle qu'on pourrait caractériser de la manière suivante :
Etape 1 : Nécessité d'une entité représentative de tous les êtres humains qui pilotera un ensemble d'institutions représentant l'ensemble de la société objectivée (le tout n'est pas un être qui possède une pensée unique, une compréhension unique mais simplement des besoins identiques fondamentaux propres à tous les êtres : manger, se soigner, s'instruire, travailler, se distraire, se vêtir, se loger, bref, satisfaire aux besoins de tous dans un espace géographique bien défini) ;
Etape 2 : promesses ou séduction du peuple au travers de groupes ou de corporation d'intérêts identiques appelées partis politiques eux-mêmes représentés par un individu (en effet : la loi de l'aliénation veut que dès qu'il se constitue une entité, une forme de superstructure apparaît et s'élève au niveau de la représentation de tous avant d'incarner par surimposition ou par faiblesse du groupe une autorité) ;
-Etape 3 : Mise en place d'un mode structurel de sélection de l'autorité (ici, le vote selon le mode : "one man, one vote" avec un principe de majorité qui exclut une catégorie d'âges inférieurs à X). La vigilance doit être accrue pour éviter la fraude électorale qui fausse les résultats d'une élection. Dans les régimes de vieille démocratie, le processus électoral semble assez bien contrôlé mais dans un système dictatorial qui joue à la démocratie, une élection n'est qu'un prétexte ;
Etape 4 : Campagnes de séduction des partis dans un certain laps de temps donné sur toute l'étendue du territoire en utilisant les moyens et les techniques de communication (médias) en usage dans la société ;
Etape 5 : Validation du projet par le peuple (élection ou sélection selon le mode un homme, une voix). En conséquence, le projet du parti victorieux, même s'il n'est pas le meilleur, s'impose à tous pendant une durée D ou le parti P aura le pouvoir de mobiliser toutes les ressources de la nation en ayant en plus l'exercice de la violence légitime.
Etape 6 : Action politique (déroulement des promesses au niveau sociétal). Le parti au pouvoir installe ses hommes à la tête des institutions du pays pour piloter sa destinée pendant une durée D selon ses promesses qui ne sont jamais totalement tenues à cause des contre-pouvoirs, des influences diverses, du lobbyisme, de la corruption, de la limite des moyens financiers qui ont été subrepticement retirés aux Etats, etc.)
Etape 7 : Satisfaction ou déception du peuple, notamment de la partie ayant consenti les suffrages. En général, vu que les promesses ne sont jamais tenues dans l'ensemble, cet électorat favorable diminue, ce qui garantit ce que l'on appelle l'alternance. En théorie, dans le cas d'un parti qui donnerait entièrement satisfaction au peuple, la possibilité d'une alternance serait impossible au niveau du parti mais seul le chef de l'exécutif changera suite à la limitation des mandats individuels s'il en est.
Etape 8 : fin de la validation populaire (fin du mandat politique accordé par le peuple) ; ici, on arrive à la fin du cycle de (cinq ou sept ans, entre autres durées de mandats) - sans que le parti au pouvoir ne résiste à abandonner le pouvoir qu'il ne détient que par délégation du peuple puisque seul le peuple est véritablement souverain (c'est une conception qui a été gagné au prix de longues luttes socio-politiques : en effet, le peuple n'a pas toujours été considéré comme le détenteur du pouvoir qui est exercé en son nom );
Etape 9 : on recommence à l'Etape 1 ce qui nous permet d'évoquer le processus de "boucle démocratique" perpétuelle.
Dans ce cycle, l'observation sociologique revèle un principe : les individus servent leur ambition personnelle de pouvoir en promettant la satisfaction des desideratas du peuple ou de la majorité de celui-ci et, ils sont tenus d'agir - tout en satisfaisant leur ambition personnelle pour le profit du peuple s'ils ne veulent pas être balayés par les urnes. Le peuple est souverain car il donne et retire le pouvoir - (ce qui nous amène à penser que si, quelqu'un n'a pas reçu son pouvoir du peuple, qu'est-ce qui pourrait l'empêcher de le garder ? Si le peuple est incapable de revendiquer qu'il est le souverain suprême qui ne donne son pouvoir que par la nécessité de l'aliénation (lire Marx et Rousseau), que se passe-t-il ?).
Or, les hommes politiques en démocratie, sont sous l'influence de partis, de groupes d'influence ou de pression, bénéficient de financement d'organismes dont ils deviennent redevables et font souvent la volonté de ceux-ci et non les promesses tenues devant le peuple. Ce qui consolide ce système, quel que soit le parti, c'est un ensemble de principes universels : le droit à tous à l'éducation, à l'eau, à l'électricité, à la protection de l'intégrité physique, à la santé par des sytèmes de mutualisation sociale des moyens collectés auprès de la totalité du peuple ou de ceux qui en disposent.
Vous me direz que c'est beau la démocratie mais ce système ne tient que s'il existe une structure judiciaire qui garantit le bon fonctionnement de ce modèle, système judiciaire qui doit être indépendant du système politique tout en ayant la possibilité de mobiliser la force de coercition légitime pour imposer le respect de la loi.
En Afrique, nous essayons de copier ce modèle sans succès car il y va déjà de la faiblesse du système judiciaire, des institutions allogènes héritées de la colonisation et qui ne nous ressemblent pas. D'autre part, ce n'est pas le système judiciaire qui mobilise la force de coercition légitime mais plutôt le système politique, d'où les coup d'Etat perpétuels. Il faut donc empêcher en Afrique si l'on veut qu'un tel modèle ait la chance de fonctionner l'emprise de l'Etat sur la force de coercition légitime. L'Etat ne doit donc pas en imposer au système judiciaire, ni déployer à sa guise la force de coercition légitime. Il faut donc que la mobilisation de la force légitime en Afrique soit décidée par le peuple afin qu'elle soit toujours du bon côté. Tant que cette aberration ne sera pas corrigée, le modèle démocratique en Afrique ne fonctionnera pas correctement.
Qu'est donc l'extrême démocratie ? C'est une société dans laquelle tout homme possède tous les droits, homme à qui s'impose dans le même temps tous les devoirs. Dans une telle société, il n'y a pas un homme qui soit au-dessus des autres - même en sa qualité de chef ou de roi. Nul n'exploite personne, nul ne possède personne - sauf par les liens de parenté dans la limite de l'exercice de son libre-arbitre et de la protection de son intégrité physique et vitale. Vous me direz : "Une telle société n'est-elle pas une simple vue de votre imagination, LDM ?" Je vous répondrai : "Non". Vous n'avez qu'à visiter le Congo profond pour observer nos villages - notamment ceux où l'autorité de l'Etat est quasi nulle pour en voir les survivances. L'extrême démocratie qui prévalait en Afrique profonde ne permettait pas au souverain de mobiliser des armées pour se lancer dans les conquêtes de territoires ou pour exploiter les ressources humaines à son profit. Le souverain dans l'espace du kimuntu n'était que le garant des droits et des devoirs de tous ; il n'avait aucun droit au-dessus du commun des mortels ; une telle société règle ses problèmes de façon collective au mbongui selon le mode du consensus total. Dans une telle société, les élections ne se justifie pas car nul ne craint qu'un fils succède à son père au trône ou à la chefferie.
En conclusion, c'est en retournant vers notre passé que nous trouverons un mode de gouvernance qui nous ressemble. Nos ancêtres n'ont jamais interdit le travail personnel mais dans la conscience collective, tous avaient le devoir de partager le surplus de gibier, de poissons, etc, car le droit à la nourriture comme le droit à la vie, était reconnu à tous. Nous avons péché par excès d'individualisme mercantile en ayant sacrifié notre esprit grégaire atavique au pouvoir de l'argent. L'avenir de l'Afrique et même du monde se trouve dans le mode de gouvernance ancien selon le kimuntu car la démocratie a le grand défaut de détruire la planète par une surexploitation des ressources juste pour la satisfaction de la convoitise de quelques-uns.
Vous avez dû remarquer que le mode d'accès au pouvoir détermine le mode de départ de celui-ci : dans le cycle démocratique, on vient au pouvoir par les urnes et on le quitte par les urnes ; dans une dictature, on vient au pouvoir par la force et on ne peut perdre le pouvoir que par la force, par la modification du rapport de force en sa défaveur. Dans le cas du Congo, la réponse de l'armée sera déterminante en 2016 : elle aura à choisir entre un homme et le peuple et si elle choisit le dictateur, elle doit être réformée en profondeur. Dans tous les cas, le nouveau président de la république démocratiquement élu doit changer la constitution et statuer sur qui a le pouvoir de mobiliser l'armée est essentiel. En fait, les dictatures ne perdurent que par le pouvoir qu'ont les dictateurs sur la force coercitive légitime qu'on leur affuble automatique dès qu'ils se hissent au sommet de l'Etat.
Il faut donc faire en sorte que le président ne soit plus le chef suprême des armées dans la nouvelle constitution et que la mobilisation de l'armée ou de toute force coercitive soit sous le contrôle du peuple au travers d'un conseil constitutionnel constitué par tous les chefs coutumiers du Congo. C'est ce que je crois...