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Voici le texte de Bakchich :
"Fillon dans l’enfer de Matignon
Dans l’un de ses chapitres « Agents très spéciaux contre " Mister Nobody" », Alix Bouilhaguet dresse un tableau peu reluisant des relations entre les conseillers du Président et Matignon. Extraits
À l’Elysée, en ce début de mandature, la guerre des conseillers fait rage, une guerre intestine entre deux puissants collaborateurs, Claude Guéant et Henri Guaino. La victime collatérale de cette surenchère médiatique sera la Premier ministre. Au château, François Fillon est même surnommé « Mister Nobody ». En français, « Monsieur Personne ». L’opposition de gausse et répète à l’envi : « À quoi sert le Premier ministre ? » François Fillon est aussi appelé« l’ectoplasme », « placé là pour se courber » et se soumettre.
(…) 2 septembre 2007, un nouveau cap est franchi. Le secrétaire général de l’Elysée est l’invité du Grand Jury RTL Le Monde, rendez-vous politique du dimanche soir. Une nouvelle fois, Claude Guéant grille au passage la politesse à François Fillon qui devait faire sa rentrée politique sur France Inter le lendemain matin. « François Fillon s’étrangle. Pour lui, un conseiller, ça ferme sa gueule. Ça conseille » rapporte un proche du Premier ministre.
(…) En trois ans, les exemples où les conseillers ont pris de vitesse le Premier ministre se sont multipliés. Le 26 mars 2009, c’est Claude Guéant qui annonce le décret qui interdit les stock-options et les bonus dans les entreprises aidées par l’Etat. En juin 2009, Henri Guaino a carrément corrigé à la radio François Fillon. Le Premier ministre avait évoqué « l’amorce d’une sortie de crise ». Guaino rectifie le lendemain sur les ondes :« Non, la crise n’est pas finie, nul ne sait jusqu’où elle s’aggravera et quand elle se terminera. » François Fillon a peu apprécié. « Je fais mon métier qui est d’expliquer la position tracée par le Président. Je suis dans la ligne » persistera Guaino
(…) « Je ne suis pas venu ici pour être juste un nègre ! » s’offusque Guaino faussement lorsqu’on lui demande son rôle. « Le président de la République est d’accord pour que je l’assume comme ça. J’apporte des idées. Je ne fais jamais d’annonces politiques. Je les suis et je les explique. Il arrive peut-être à Claude Guéant d’en faire, moi jamais. Je fais du service après-vente et il n’y a pas de concurrence déloyale. » mais pour le Premier ministre, il s’agit bel et bien d’une concurrence déloyale.
Les rapports entre François Fillon et Henri Guaino n’ont jamais été excellents, même si les deux hommes se connaissent bien. Tous les deux étaient proches de Philippe Séguin. Ils s’inscrivaient dans son sillage. Ils ont beau partagé, à un moment, les mêmes idées, dorénavant, ils ne se supportent plus. En fait, ils se seront souvent croisés sans jamais se comprendre. À Matignon, où on lui voue une certaine estime intellectuelle, on explique qu’Henri Guaino possède surtout les défauts de ses qualités. « Talentueux mais totalement dingue ». Les bureaux de la rue de Varenne gardent encore en mémoire les coups de fil répétés du conseiller spécial expliquant régulièrement que « François Fillon est en dessous de la ligne de flottaison ». « Ce qui dérange Fillon, tonne un proche du Premier ministre, ce qu’il n’apprécie pas, c’est d’être obligé de supporter Claude Guéant et Henri Guaino. Encore Guéant, c’est normal, il est secrétaire général de l’Elysée. Mais Guaino : qui connaît Monsieur Guaino ? Pour qui se prend-il quand il intervient sur tous les sujets ? »
(..) Si les conseillers de l’Elysée gênent le Premier ministre, ils interfèrent plus encore avec les membres du gouvernement. Car ils constituent le cœur du pouvoir. Tels des souffleurs de théâtre, ils doublent tous les ministres. Ce sont de vrais tuteurs qui règlent les dossiers. Propos d’un cadre de l’UMP : « Claude Guéant est Premier ministre, Jean-David Lévitte, ministre des Affaires étrangères, Patrick Ouart est garde des Sceaux, Raymond Soubie est aux Affaires sociales… Et la liste est longue ». Inquiet, Nicolas Sarkozy installe un filet de sécurité en dessous de chaque membre du gouvernement, même lorsque l’on pense avoir affaire à un ministre chevronné."
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