GUERRES !
Quand coûte que coûte s'imposer volonté(s) sur volonté(s),
Quand la parole vêtue de mots ne plus suffire pour convaincre
Et que coûte que vaille posséder la terre de toutes les convoitises,
Les hommes, les biens, les vies, l'air, l'eau, les pierres qui brillent,
Et guerre de germer, et glaive de se lever et frapper à mort.
Ils se haïssent et deviennent ennemis sur commande - sans se connaître,
Ils se combattent de toute leur vigueur sans se détester
Avec pour unique loi :"Vaincre ou mourir, tuer pour survivre"
Lève l'oeil, mon fils, et vois myriades sur myriades s'entre-tuer !
L'homme tue pour une idée ; la bête tue pour survivre,
L'homme tue pour assujettir les vivants ; la bête tue pour se nourrir,
L'homme tue pour tuer, la bête tue par nécessité vitale.
J'ai vu le bras long et musclé de l'injustice, un bras de feu,
Lever le drapeau blanc de l'innocence, dans la main gauche,
Une kalachnikov et un livre saint dans la main droite, en riant.
L'obéissance ou la mort, telle est leur devise miroir
Inscrite au frontispice de l'histoire depuis le premier chef.
La force de la raison est aussi la raison de la force.
Que reste-t-il à ceux qui n'ont que la force de leurs idées,
La force de leur liberté, la force de leur raison ?
Ils combattent armés de la terreur de leur mort
Quand ils ne veulent pas obéir à la volonté armée.
Cette guerre d'un genre nouveau est celle du faible en armes,
Celle du terrorisme par-delà sainteté et folie.
On s'est battu et on se bat encore pour la terre du bon Dieu silencieux,
Dessinant des parcelles d'autorité selon la force et l'argent, l'argent et la force.
Folles passions d'une poignée de maîtres incendient la terre
Car la gourmandise est de tout posséder de gré ou de force.
Ils ont instrumentalisé la mort pour le triomphe de leur volonté
Et le sceptre de l'Apocalypse est brandi pour domestiquer
Par la peur du feu ceux que l'on veut maintenir dans la servitude.
L'appétit des rois et la folie des saints nous promettent des guerres
Qui saigneront encor et encor ceux qui auront tort d'exister pour obéir.
J'entends crier le sang des innocents le long des âges,
J'entends pleurer les victimes du glaive et du canon.
Guerre ! Terreur ! C'est l'invention de l'homme
Fatigué de mourir de mort naturelle dans son lit douillet...
Quand la violence des volontés opposées par autrui
Se fait violence des chairs et des os par l'outil qui tue,
Quand le triomphe des passions guerroie à feu et à sang,
La main du laboureur romain s'arme de mort et abat le coeur qui bat.
Vivre ou mourir ! Tuer pour tuer ! Vaincre, c'est tuer pour vivre;
Le sang des forts en art martial fait couler celui des faibles :
L'autre doit périr au nom du roi, l'autre, la volonté ennemie.
Guerre ! Mort ! Mon meurtre ne m'appartient pas :
Je suis un soldat et je prête ma main au souverain
Qui dispose de ma vie et de main, lui qui absout mon crime.
Ils sont morts pour la patrie ; l'héroïsme du guerrier est sacrifice.
Ils sont morts pour le souverain. vive le roi, qu'il règne jamais !
L'holocauste n'est pas pour Dieu mais pour l'homme.
J'ai tué mon ennemi qui ne m'a rien fait au nom de mon roi
Et mon âme est soulagée de rester en vie. victoire !
Ordonne, ô roi, que ma main soûle devienne mort !
La patrie est née du sang mis en commun pour la gloire du roi.
Oubliées nos vindictes de tous les jours et la monotonie
Des jours tournés vers la quête du pain quotidien et d'un peu de joie;
Seul compte l'étendard coloré qui est l'emblème de la nation.
Ne pleure pas, fils de la nation, la vie te pourvoira un autre père !
Ne pleure pas, fille de la nation, le pays te donnera un autre époux!
La terre a bu le sang de ses enfants sans sourciller, la bouche cousue,
La mort passe en rires et en pleurs, la vie continue, les guerres reviendront.
Ainsi naît un monde nouveau, un monde qui tue et qui oublie.
Mouvimat IBOUANGA LOUNDOU, in "L'amertume du vin doux de l'exil", 2004