Bonjour, Laurent. Il est révoltant de voir un peuple subir l'injustice, l'arbitraire, la négation de ses droits, sans qu'il puisse oser se soulever, se rebeller - même quand la souffrance atteint un tel paroxysme ! Certes les dictatures ont pour eux l'usage de la violence et de la coercition légitimes mais que peuvent-elles faire face à des peuples déchaînés, survoltés ? Il n'y a rien pour tenir des peuples qui se révoltent dans leur totalité. Aussi, ont-ils toujours été divisés. Et, d'entrée de jeu, je fais remarquer que les colonisateurs n'avaient pas pour but de faire de nos tribus ou de nos ethnies des nations. Au contraire ! Ils ont créé des divisions plus marquées avec l'état civil. Avant, l'identité était clanique et non tribal avec ceci que le clan traversait et commentait toutes les tribus. J'ai eu une agréable surprise d'être contacté par un MINDZUMBA BEMBÉ à Mouyondzi !
Tu te demandes pourquoi notre peuple ne réagit pas à toutes ses souffrances, de sorte à renverser la table de la dictature. Comment pourrait-on expliquer cela ? Je vois que tu t'arrêtes au niveau de l'indignation. Peut-être que le temps te manque pour creuser ton questionnement. C'est déjà une bonne démarche de s'interroger car celui qui ne s'interroge pas ne peut pas chercher les réponses concomitantes aux questions.
Les réponses sont à rechercher à plusieurs niveaux :
1)- Comment se constitue une nation unie et solidaire ?
2)- Quels sont les facteurs psychologiques (intériorité) et environnementaux (extériorité) qui conduisent un peuple à prendre conscience (ne pas négliger cette étape) et à défendre ses droits ?
Les deux registres sont liés. Je m'explique : si une nation n'existe pas mais qu'il existe juste un ersatz de "république" extraverti, la deuxième question ne se pose même pas. En effet, l'addition de plusieurs ethnies pour servir une ou des puissances étrangères ne fait pas une nation. Je pense même que le Congo n'est pas l'addition de plusieurs ethnies mais la SUPERPOSITION de plusieurs ethnies, chaque ethnie cherchant à dominer sur les autres.
On ne peut pas envisager la deuxième question sans avoir résolu les problèmes posés par la première.
Si d'aventure, la question 1 n'était plus un problème, se poserait celui de la conscience de ses droits. Contrairement à ce que l'on pense, nous le voyons chez nous, ce n'est pas aussi facile de prendre conscience de ses droits. En effet, une nation est une donnée impersonnelle, abstraite et qu'un tout au niveau humain ne peut pas s'administrer au niveau du tout : même la cellule s'administre au niveau de l'ADN avec l'ARN comme exécutant fidèle du plan de bonne gestion de l'ensemble - en toute solidarité car l'organisme humain est un tout intégré. Les sociétés humaines doivent s'aliéner pour se gouverner et là commencent nos problèmes : ceux qui atteignent le niveau de l'administration du TOUT SOCIÉTAL ont tendance à réduire les droits des autres quand ils ne les nient pas totalement.
Les droits qu'une société concède sont d'abord MENTAUX, ABSTRAITS au départ. En effet, ce sont d'abord des mots, des concepts qu'il faut traduire dans la réalité, dans les faits, dans la résolution des problèmes de tous les jours.
On n'a pas son bon droit dans la poche comme une pièce de cent francs CFA ou dans l'assiette comme un morceau de ngoulou mou mako pour le défendre contre les voleurs ! Le droit est un élément de nature psychologique avant tout. Il faut une éducation pour qu'une telle idée germe dans le cerveau et qu'on ait envie de la défendre comme les nôtres défendent les idées religieuses que les pasteurs des églises de sommeil et de mensonge fourrent chaque dimanche dans le cerveau des nôtres. Sans cette étape d'intériorisation, les nôtres ne peuvent pas se battre pour changer les données extérieures ! Voilà ce que j'en pense !
Voici l'indicateur principal qui nous renseignera sur le niveau de la question 1 : TANT QUE L'ETHNIE SERA AU-DESSUS DE LA NATION ET QUE NOUS AURONS UN NON ETAT PARCE QUE JUSTE UNE ETHNIE-ETAT, C'EST QU'IL NOUS FAUDRA D'ABORD RÉSOUDRE CE POINT.
Néanmoins, on peut aussi résoudre la question 1 en commençant par la résolution de la question 2 : il faut introduire une sorte d'éducation de la conscience du droit et de la nécessité de le défendre depuis l'enfance jusqu'à l'université et même en faire une question d'éducation de l'enfant ! On doit armer les nôtres du droit, du devoir de défendre la liberté dès la tendre enfance. Nous avions un déficit dans le subconscient quand les étrangers vinrent chez nous : NOUS N'AVIONS AUCUNE EXPÉRIENCE DE LA VIOLENCE DE L'HISTOIRE ET DE LA DICTATURE DES SOUVERAINS CAR LES NTOTILA DE MBANZA KONGO ÉTAIENT DES SAGES. Dans un tel environnement, on ne pose pas les questions du droit, de la liberté, de l'égalité. On n'est donc pas enclin à prendre une posture défensive. Ce terreau a facilité la conquête de nos ancêtres. Ils ont fait confiance aux étrangers comme ils faisaient confiance au Ntotila.
Pour résoudre nos faiblesses, il faut posséder le pouvoir politique ou surfer sur le pouvoir religieux ou sur le pouvoir culturo-éducatif. Le travail est ardu. Les moissonneurs manquent par ailleurs. Si toi et moi n'avions pas pris des risques pour conscientiser nos compatriotes, le peu d'éveil auquel nous assistons n'existerait même pas !
Je n'écris plus beaucoup car désormais, il y a beaucoup à lire. Cependant, il faille encore transformer le démocrate émotionnel en démocrate politique. Là aussi, il y a du boulot. Tu es plus jeune que moi. J'ai beaucoup donné. Je vous laisse le soin de terminer le travail.
MBUTA NE NKOSSI ZA MAKANDA,
LION DE MAKANDA,
MWAN' MINDZUMB'